mercredi 30 mai 2012

Bernard Noël : Arno Breker et l'art officiel

 

Condensée pour des motifs d'ordre pédagogique, la réflexion de B.Noël telle qu' ici présentée met surtout l'accent sur les rapports entre art et politique, en omettant les développements de la question (fondamentale pour l'auteur) de savoir si et comment « on peut écrire sur Arno Breker ». 
 
Le texte complet est accessible  sur http://www.theatreatoutprix.fr/Theatreatoutprix/Pegase/Ecrits/noel.htm


Bernard Noël a rencontré  en 1980 celui qui fut le sculpteur attitré de Hitler, et dont l'oeuvre avait également retenu l'attention de Staline ; les régimes totalitaires, au nom de l'art, recherchent la même illustration. Suite aux deux entretiens qu'il a eus avec lui, B.Noël cherche à comprendre comment un artiste peut arriver à s'aveugler sur son art au point de le croire supérieur à toutes les circonstances : « En réalité, je n'ai rien à voir avec la politique. Je suis un artiste, et à cause de mon talent, j'ai reçu de grandes commandes. Un point, c'est tout. »
Comment parler d'une oeuvre qui se rattache à une période historique devenue intolérable ? Où trouver la certitude dès lors que l'on a conscience de la relativité de toute vérité, et même que cette relativité est notre seule chance contre les divers totalitarismes ? Si l' 'incertitude est à son tour relative, elle n'interdit pas que nous sachions reconnaître l'évidence. Elle en a même besoin pour que, entre le doute et le clair regard, s'élargisse notre liberté de choisir. L'artiste doit éveiller le regard et si lui-même ne voit pas clair, quel rôle peut jouer son oeuvre ?
L'histoire n'est pas fixe, elle est tout le temps réécrite, mais cette fluctuation n'empêche pas que nous continuions à interpréter certains faits toujours de la même façon pour lutter contre l'oubli ou la banalisation.
La tentation première est de dégager l'oeuvre de l'interprétation étroite qui la lie à son temps parce que cette interprétation n'a pas changé alors que tout changeait. Breker souffre d'être maintenu dans une situation sans appel (« Depuis trente-cinq ans, je ne peux plus exposer parce que je suis coupable. Pour tout le monde, je suis un homme qui a eu tort, un vaincu »). Pour avoir été un sculpteur exemplaire, il apparaît comme victime de sa propre gloire. Mais s'il se veut exemplaire, ce n'est pas d'une époque mais d'un art, il estime qu'il n'a pas servi un régime, il a servi la sculpture.
La sincérité de l'homme peut toucher, mais en quoi la sincérité est-elle un critère quand on veut quitter le plan maudit des événements pour celui, soi-disant immuable, de l'art ? Il ne suffit pas d'être sincère pour être crédible. Devant un camp d'extermination, l'excuse « je ne savais pas » n'appelle qu'une seule réplique : « vous n'avez pas voulu savoir ». 
 
Reste à explorer les raisons de ce refus de savoir. Elles tiennent au dévouement à l'Art et à la certitude que ce dévouement produit. Il n'y a pas de doute que l'unique lien de Breker avec le régime nazi fut le goût qu'avait Hitler pour sa sculpture, goût qui motiva d'énormes commandes, lesquelles suffirent à aveugler A.Breker :« j'ai eu autant de commandes qu'a pu en avoir Phidias ou qu'en ont eu les anciens Egyptiens ». Et elles continuent à le faire : il ne se rend pas compte, semble-il, que si le régime servit sa sculpture, c'est que sa sculpture servait le régime.
Il n'a vu que les possibilités qui lui étaient offertes et il en a déduit qu'un régime capable de les lui offrir était un régime nécessairement favorable à l'Art. « C'est un vice de faire de moi un homme politique : si j'avais fait de la politique, je serais devenu ministre. (...) La commande ne conditionnait pas mon art : elle était une commande et non pas l'ordre de faire ceci ou cela. J'ai toujours essayé de représenter le sens par un symbole ; par exemple si je représente saint Martin, je montre celui qui partage, qui protège. Les gens simples comprennent cela tout de suite. Hitler a vu que mes oeuvres pouvaient parler à tous. »
La faille de ce raisonnement est qu'il suppose un absolu, qui est l'Art, et qu'il ne l'imagine pas susceptible de la moindre dépendance. Il n'y a rien que l'immortalité de l'Art, et le commanditaire est magnifié par l'oeuvre dont son geste permet l'existence.
L'homme qui est entré dans l''immortalité n'a pas besoin d'expliquer des détails, il est dans la valeur, il est même la valeur. Il est dérisoirement pathétique d'entendre, dans ce contexte, A.Breker faire le compte des gens qu'il a sauvés (tels ces prisonniers français soustraits aux stalags pour devenir des assistants de l'Oeuvre). A l'écoute de ce qu'il avance comme des preuves, il apparaît que le sens n'est pas dans le geste mais dans la relation du geste avec tout ce qui le porte. A.Breker a été acquitté par le tribunal chargé de dépister les anciens nazis, et son juge, un communiste réchappé des camps, lui a déclaré l'admiration qu'il vouait à son oeuvre. Cela ne suffit-il pas ?
Non, car si l'Art n'est plus l'absolu, il faut tout de même qu'il soit absolument quelque chose. L'homme aura toujours besoin de quelque chose de meilleur que lui-même, ne serait-ce que d'une image où s'éclaircit la noirceur du jour. La mort des dieux a ramené le pouvoir sur la terre ; elle y a également ramené le mal. Contre ce mal, il ne reste peut-être que l'art – non pas l'art en soi, mais l'effort qu'il exige et la compréhension qu'il suscite.

Ce qui déroute A.Breker, c'est que son acquittement ne l'ait pas réhabilité, quand tant d'autres le furent. S'il avait été le plus coupable, il ne pourrait endosser ce rôle de bouc émissaire, ni s''il était le plus innocent. Il fut seulement le plus visible, et c'est justice puisqu'il donnait à voir. Le paradoxe est que presque tout ce qu'il donnait à voir a été détruit et est devenu invisible. Son malheur est dans le décalage qui existe entre la notoriété de son oeuvre invisible et le refus de voir son oeuvre visible : depuis trente-cinq ans plus aucune commande officielle, il ne lui reste que son jardin et les salons privés de ses discrets amateurs.
Il est assez probable qu' A.Breker ait plu à Hitler sans lui faire aucune concession. Son rapport au dictateur ne se pose pas en termes de soumission, mais d'exaltation : « Hitler a donné l'ordre de ramener du front les gens de talent. Moi j'étais chargé de les faire revenir. Il voulait que la vie artistique continue.(...) Sous le régime national-socialiste, chaque artiste disposait des ressources nécessaires pour poursuivre son oeuvre. (...) S'il n'y avait pas eu la guerre, Hitler serait entré dans l'histoire comme l'un des plus grands bâtisseurs ». Ces affirmations ne reflètent pas un choix politique, mais toujours la même aberrante satisfaction artistique. Qu'attend de l' Etat un artiste comme Breker? Des commandes et le soutien de son activité – et dès que l'appareil politique reconnaît l''éminence de sa vocation, l'artiste bornera son sens critique à corriger quelques bavures, en aidant par exemple des Juifs ou des prisonniers. Il est fort possible que Breker n'ait jamais été hitlérien tout bonnement parce que Hitler lui semblait être brékérien.
Mais Breker prononce ces phrases en 1980. Après avoir déclaré qu'il eut une crise cardiaque en apprenant la vérité sur le nazisme. Plus question maintenant de plaider l'ignorance, de ne pas savoir que les artistes juifs, communistes ou expressionnistes ont été interdits, liquidés. Que signifie alors affirmer en 1980 que « sous ce régime, aucun artiste n'avait de souci, aucun » ? Ou bien que Breker n'a rien appris, rien compris. Ou bien que, comme le régime qu'il servait, il ne considérait pas ces « dégénérés » comme des artistes. Autant dire que sous le IIIe Reich, il n'y avait que de « bons » artistes puisque les « mauvais » n'avaient pas le droit d'exister.
Les protestations d'A.Breker contre une interprétation politique de son oeuvre ne sont recevables que si l'on oublie les circonstances dans lesquelles il l'a créée ; elles signifient que cette oeuvre est « bonne » en soi, et qu'elle n'aurait pas été différente dans une autre situation politique. Pour s'en tenir là, il faudrait que l'art soit pur, qu'il n'ait d'autre sens que lui-même. La condition pour qu'il en aille ainsi serait qu'il soit libre de toute référence. Mais l'art est toujours accepté - et d'abord par le pouvoir - en fonction de ses références.
Après avoir indiqué un rapport à l'Art dont l'absolutisme peut expliquer l'attitude d'A.Breker, il faut enfin déshabiller l'oeuvre de son idéal pour la voir telle qu'en elle-même, dans ce qu'elle représente et dans l'effet qu'elle produit.

***
Que voit-on dans les jardins et dans l'atelier d' A.Breker ? Ce qui frappe, c'est l'exaltation d'une beauté virile qui inspire la force, l'ordre et l'équilibre. La beauté est davantage le support de ces valeurs qu'une fin en elle-même. Aujourd'hui comme hier, Hitler pourrait toujours s'éprendre de l'oeuvre d'A.Breker.
L'Art donne forme, et le fait qu'il atteigne la perfection de cette forme n'est en rien un alibi ; au contraire, car la perfection exalte l'idée que la forme suggère. L'art n'est qu'une séduction de plus, une séduction suprême, et c'est ce pouvoir qu'honore en lui la commande hitlérienne.
Or, le moins qu'on puisse attendre de l'art est qu'il sache qui il sert. L'art qui sert le pouvoir n'a pas l'habitude de l'affirmer : il préfère servir sa propre cause en étant accessible à tous. Et il considère comme respect du peuple cette soi-disant transparence. En réalité, n'est transparente que la chose qui ne pose pas de question. Il ne faut pas que le peuple s'interroge sur la signification car il risquerait de s'interroger sur l'ordre des choses, et de devenir lui-même producteur de sens au lieu de se contenter de ce qui est établi. L'art abstrait est interdit en URSS comme l'art « dégénéré » l'était dans l'Allemagne nazie. 
 
Mais aujourd'hui rien ne peut plus nous satisfaire, qui n'appelle d'abord notre participation en nous questionnant. La sculpture moderne le fait à travers des formes où elle se met elle-même en question. A.Breker par contre continue à ciseler des statues correspondant à l'image que la majorité des gens se fait de la sculpture, et c'est la raison qui le rend aimable au pouvoir. Son ascension officielle aurait eu lieu sous n'importe quelle dictature pour peu que celle-ci veuille répandre l'illusion d'un art accessible à tous. L'oeuvre de Breker est exemplairement adaptée à remplir un rôle officiel sous n'importe quel régime décidé à imposer une représentation exclusive, là où la classe dirigeante détient la seule vérité applicable dans tous les domaines.
L'art officiel ne doit pas inquiéter ; il lui faut séduire par une aisance du métier qui projette l'image de la perfection.

Breker raconte : « J'ai vu Molotov en 1940. Il m'a dit : je vous apporte le salut de Staline, qui m'a ordonné de vous transmettre ceci: la Russie eu de grands écrivains, de bons peintres, pas de sculpteurs. Le peuple est enchanté de ce que vous faites. Il faut que vous acceptiez de travailler pour la Russie. (...) Je regrette aujourd'hui de ne pas avoir travaillé pour Staline. Parce qu'il a laissé la culture intacte. J'ai eu aussi des offres de Peron et de Franco, mais je regrette seulement Staline ».
Il est déjà significatif qu'A.Breker pense encore, en 1980, que Staline « n'a pas touché aux arts », mais pourquoi les deux dictateurs l'ont-ils également jugé « bon » ? La réponse à cette question, qui ferait surgir leurs points communs, suffirait-elle à définir l'art officiel ? Ce n'est pas si simple. S'il est indispensable en effet que l'art officiel plaise au lieu de faire réfléchir, cet art est loin d'être homogène, comme il pourrait sembler à première vue. Ou plutôt il n'est homogène qu'en tenant compte d'un clivage par rapport auquel ses oeuvres se répartissent en deux catégories.

Pour illustrer ce clivage, il suffit de comparer La Camaraderie (1937) de Josef Thorak (premier sculpteur adopté par le régime hitlérien) et Les Camarades (1940) d''Arno Breker.
 



Dans le groupe de Thorak, deux homme se tiennent par la main, la jambe gauche de l'un croise en avant la jambe droite de l'autre ; leurs corps sont moins athlétiques que tendus et gonflés par une force prête à affronter le monde entier. Les jambes sont lourdes et la poitrine large : en dressant sur la terre leur verticalité, ils en soulèvent l'obscure et brutale épaisseur. La facture est rude, massive, d'un réalisme qui préfère l'évidence à l'allusion.



Le groupe de Breker représente aussi deux hommes : l'un tient l'autre dans ses bras, mort, bras ballants, corps relâché. Le porteur a la bouche ouverte pour un cri de défi, son attitude exprime un élan dramatique, et une grande vigilance à l'égard du corps de son camarade. La nudité de ce dernier est celle du jeune éphèbe : l'approche de la destruction rend encore plus précieuse sa beauté, et son camarade offre l'image d'une ardeur révoltée doublée d'une tendresse protectrice. Le traitement est allusif, avec un réalisme qui a ses références dans la culture et non dans la vision directe.
Breker cherche le symbole ; Thorak fait image. Le premier séduit par un néo-classicisme dont le spectateur est flatté de reconnaître les signes. Le second attire en voulant dire « la vérité » dans sa réalité immédiate. La figuration néo-classique imite la nature avec la volonté de lui ajouter l'intelligence ; la figuration réaliste copie la nature pour s'en adjuger la vérité.

Les régimes totalitaires sont évidemment plus soucieux de « vérité » que d'intelligence, aussi le réalisme a-t-il d'emblée leur préférence : avec lui, pas de problèmes, tout le monde « comprend ». Pourquoi tout le monde comprend-il ? C'est très simple, mais jamais dit : tout le monde comprend parce qu'il n'y a rien à comprendre. On rabat automatiquement l'oeuvre sur ses référents, ou l'inverse, et on croit en avoir pénétré le sens. Ce tour de passe-passe permet de montrer la réalité telle que le pouvoir veut qu'elle soit en faisant comme si elle était représentée telle qu'elle est.
La figuration néo-classique est moins directement illustrative parce que ses référents sont moins « réels ». Elle tire ses sujets de la mythologie, ce qui suppose une médiatisation plus complexe – encore que l'intelligence qu'elle requiert puisse faire illusion : un Apollon ou un Prométhée ne sont après tout pas plus difficiles à comprendre qu'un Ouvrier ou un Paysan. Leur supériorité vient probablement de ce qu'ils font plus riche.
Arno Breker put l'emporter sur ses confrères officiels parce qu'il savait modeler ses statues avec un réalisme que son parfait métier et sa culture lui permettaient de métamorphoser. L'exécution transforme le portrait : le personnage réel devient l'incarnation d'une idée réalisée.
La grande révélation, pour Breker jeune, vint de Rodin, mais le modelé de Rodin résiste mal au plein air et à sa lumière changeante. S'éloignant de Rodin, Breker a perfectionné un arrondi sans traces qui garde sa puissance sous n'importe quelle lumière.
Si l'art ne saurait être pur, le regard que l'on porte sur lui ne saurait l'être non plus. On peut trouver le talent de Breker indiscutable sans perdre pour autant la notion de la relativité. Breker se situe dans la mouvance d'une tradition qu'il a délibérément choisie, et il s'en explique :« En 1919 j'ai cru que le passé était coupable de notre défaite ; j'ai pensé qu'il fallait détruire du passé pour construire du nouveau. J'ai abandonné le travail d'après nature pour suivre le cubisme. (...) C'était en 1922. J'étais content mais pas du tout assuré. J'ai rendu visite à Paul Klee et je l'ai vu travailler sur cinq tables à la fois. Cela m'a bouleversé mais pas favorablement à Klee. Chaque oeuvre exige la concentration et non pas la dispersion.(...)Je me suis remis à l'étude d'après nature (...) les années passées à Paris m'ont moins apporté que mon séjour en Italie : le Capitole, les musées, Michel-Ange, voilà, c'était mon chemin. Hitler m'a donné les moyens de réaliser mes idées. (...) Si on avait traité l'industrie comme on me traite, l'Allemagne serait ruinée. (...) Moi, on me traite comme un criminel. Personne n'a remarqué que Staline m'avait demandé de faire le même genre de sculpture que j'avais fait ici ».
Que l'oeuvre soit « bonne » pour deux régimes opposés ne garantit pas qu'elle est vide de sens politique. Breker ne voit pas la ressemblance entre Hitler et Staline : il n'éprouve que la nostalgie des grands hommes qui lui auraient permis « de réaliser ses idées ». Comment aimerait-il une démocratie qui le réduit au silence ?
En l'écoutant, B.Noël assiste au renversement de quelques mots qu'il croyait stables : quand Breker explique qu'il n'a pu se rendre à Paris à cause de l'« Invasion », ce mot désigne ce que lui a toujours appelé la « Libération ». Breker parle français, et pourtant ils ne parlent pas la même langue. Combien y a-t-il de langues dans une langue ? Et combien de regards possibles sur une seule chose ? Qui voit clair ?
« Je cherche cependant à écrire pour voir », conclut-il. « Je cherche une langue qui éclaircisse la vue, et non pas qui soit le reflet d'une idéologie toute faite ».
Vaille que vaille, il faut affronter dans la sincérité de chacun, et dans la sienne propre, ce qui la fait mentir, et affronter dans la vérité générale ce qui finit par devenir une idée toute faite. Il faut affronter dans notre camp ce qui ressemble au camp adverse, et qui nous dicte des positions justifiées d'avance : « Je redoute un monde où Arno Breker serait une valeur indiscutable, et je redoute également un monde où il serait interdit de parler de lui ».


 
(*) La censure bâillonne. Elle réduit au silence. Mais elle ne violente pas la langue. Seul l’abus de langage la violente en la dénaturant. Le pouvoir [occidental] fonde son libéralisme sur l’absence de censure, mais il a constamment recours à l’abus de langage. Sa tolérance est le masque d’une violence autrement oppressive et efficace. L’abus de langage a un double effet : il sauve l’apparence, et même en renforce le paraître, et il déplace si bien le lieu de la censure qu’on ne l’aperçoit plus. Autrement dit, par l’abus de langage, le pouvoir se fait passer pour ce qu’il n’est pas : un pouvoir non contraignant, un pouvoir " humain ", et son discours officiel, qui étalonne la valeur des mots, les vide en fait de sens – d’où une inflation verbale, qui ruine la communication à l’intérieur de la collectivité, et par-là même la censure. Peut-être pour exprimer ce second effet, faudrait-il créer le mot SENSURE, qui par rapport à l’autre indiquerait la privation de sens et non la privation de la parole. La privation de sens est la forme la plus subtile du lavage de cerveau, car elle s’opère à l’insu de sa victime. Et le culte de l’information raffine encore cette privation en ayant l’air de nous gaver de savoir. (L'Outrage aux mots, Bernard Noël, 1977)







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